Le sang de l’oubli, le sang de l’avenir

Publié le 28 Mai 2012

tn-copie-1L’œuvre est comme un fleuve qui s’agrandit sur son passage, d’où vient que sa forme ramasse les bordures de son chemin.


Je n’ai jamais su écrire une page sans compter des croquis, ni écrire une phrase sans revenir sur des ratures. Parfois j’invente les tournures grammaticales les moins banales en essayant de rapprocher le poème de moi, de ma façon de voir les choses, et de m’éviter s’il le faut. Mais une chose est sûre, j’ai toujours su comment oser. Oser c’est créer, et la poésie naît de ce mouvement, de cette guerre contre soi-même, d’un dédoublement de soi, d’un jeu du je...

 

Dans son livre Mûr à crever, Franketienne dit : « Je ne m’inquiète point de savoir ce que j’écris. Tout simplement j’écris. Parce qu’il le faut. ». Ici le désir d’écrire parce qu’il le faut, est l’acte même d’oser, de créer. Parce que les éléments créatifs sont autour de nous, et nous le saurons à partir du moment où l’on commencera à s’en servir.  D’où le fait que le créateur est celui qui ose, et qui s’invente. Et c’est ce que fait le poète Jean-Mino Paul. Prendre la plume afin d’ajouter sa voix dans celle de la ligue littéraire haïtienne.


« L’angélus enfante

L’aurore dans mes yeux

La nuit s’en va

Mes rêves partent. »


Aussi simple qu’apparaissent ces vers, il nous montre une présence culturelle dans l’utilisation de la langue. L’angélus, ce mot calqué en créole en haïtien en : « alanjelis », est un mot très cher à la paysannerie haïtienne, qui crée une distance culturelle entre le jour et la nuit. Le soleil pour les vivants, la lune pour le besoin.

Plus loin :


« Ma vie voyage

Comme une étoile en fuite

Dans le gris de l’espace »


L’étoile qui s’enfuit dans le gris de l’espace, n’est autre qu’une annonce de mort dans l’imaginaire collectif de l’Haïtien. On le voit, on recherche son point d’arrêt, et cette zone sera en deuil dans les jours à venir. On écrit pour trouver les autres, pour parler d’un autre dans son monde, parce que l’histoire des hommes va plus loin que celle de la vie et de la mort.


Et dans certains passages l’écriture nous arrive avec le souffle d’un jeune écrivant une maxime.

 

«Aimer

Est un ennui

Une affliction

Une blessure

Aimer

Est une joie

Un bonheur

Une grande aventure » 


La parole poétique n’est pas une parole étrange et voilée, elle découle du vécu quotidien, tout en l’écartant pour devenir une parole étrange par la forme. En ce sens, le poète doit travailler son style jusqu'à trouver une conscience poétique.

 

Anderson Dovilas

23 Mai 2012     

Rédigé par Parole en Archipel par Thélyson Orélien

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